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Chronique • Mutilations génitales féminines : un plaidoyer pour la santé sexuelle

6 février 2023
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Même si l’utilisation de l’expression « mutilation génitale féminine » et son acronyme « MGF » est parfois remise en question dans certains milieux, ils seront utilisés tout au long de ce texte à des fins de simplification et de compréhension. Nous vous invitons à lire les notes de bas de page 1 et 2 pour comprendre pourquoi l’autrice a tout de même fait le choix de les utiliser dans le cadre de cette chronique.

 

Afin de souligner la Journée internationale de la tolérance zéro à l'égard des mutilations génitales féminines (MGF) ayant lieu annuellement le 6 février, Les 3 sex* propose un dossier exhaustif présentant ressources, outils, évènements, projets, campagnes de sensibilisation en cours et produits culturels d’ici pour se familiariser avec les enjeux liés aux MGF. S’ajoute à ce dossier le texte ci-dessous qui permet de voir comment les MGF s’inscrivent comme un enjeu de santé sexuelle.

En guise d’introduction à ce dossier, il est aussi possible de lire la chronique « Clitoris, orgasme et identité : les mutilations génitales féminines » publiée en 2018 et portant plus largement sur les impacts biologiques et psychologiques des MGF.

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L’Organisation mondiale de la Santé (OMS, 2022a) définit les mutilations génitales féminines (MGF)1 ou mutilations sexuelles féminines comme les « interventions incluant l'ablation partielle ou totale des organes génitaux externes de la femme2 ou toute autre lésion des organes génitaux [dits] féminins qui sont pratiquées pour des raisons non médicales ». Les MGF peuvent être classifiées en différents types et sous-types, mais aucun de ceux-ci n’a de bienfaits pour la santé (OMS, 2022a). À l’inverse, les conséquences délétères sur la santé mentale et physique sont très nombreuses, incluant entre autres des problèmes urinaires, menstruels, reproductifs, sexuels et psychologiques à court, moyen et long termes (OMS, 2022a).

Les MGF sont généralement pratiquées sur les jeunes filles de moins de 15 ans pour des raisons culturelles et sociales liées à des traditions ou des croyances perpétuées dans certaines communautés (OMS, 2022a; Perron et al., 2020). Ces raisons varient énormément en fonction des différentes communautés, mais les plus fréquemment citées3 sont le fait :

  • d’assurer la « virginité », puis la fidélité des femmes;
  • de les préparer au mariage ou de les rendre plus « attrayantes » pour leurs futurs époux;
  • de contrôler leur sexualité (comportements, libido, etc.);
  • de les rendre plus « propres » (hygiéniques);
  • de les rendre plus « belles » et « féminines » (OMS, 2022a).

Ainsi, cette pratique est communément perpétuée pour assurer l’acceptation sociale et la sécurité économique des jeunes femmes, considérant que les MGF assurent leur « mariabilité » et que le mariage est souvent un des seuls moyens pouvant leur assurer une certaine stabilité et sécurité financières (Perron et al., 2020).

L’OMS (2022a) estime que 200 millions de filles et de femmes actuellement en vie ont eu une MGF et que 3 millions de filles additionnelles sont à risque de subir une MGF chaque année (OMS, 2023). Les MGF sont principalement pratiquées dans une trentaine de pays d’Afrique, d’Asie et du Moyen-Orient, mais elles sont toutefois bien présentes dans plus de 90 pays à travers le monde (EqualityNow, 2020), notamment au Canada (Gouvernement du Canada, 2022).

La carte interactive du National FGM Centre permet d’identifier les pays dans lesquels les MGF sont pratiquées à plus forte prévalence et présente plusieurs informations, dont la terminologie utilisée, les dispositions légales existantes, les types de MGF pratiquées en fonction des régions, etc.

                                                                                                                    Crédit photo : National FGM Centre, s.d. - utilisation équitable

De plus, en raison des mouvements migratoires, il est estimé qu’environ 10 % des personnes ayant eu une MGF vivent en Occident (TCRI, 2020). Les fillettes nées dans des pays où les MGF ne sont pas répandues sont aussi à risque de subir une MGF en raison du phénomène de « vacation cutting » (Chiodini, 2017; Gouvernement du Canada, 2022), une pratique ayant pour but d’emmener les filles à l’extérieur du pays pour leur faire subir une MGF.

La carte interactive du End FGM European Network permet de connaître les données concernant les MGF dans 14 pays européens, en plus de recenser les lois, politiques et services en lien avec les MGF. Un guide d’utilisation de la carte est aussi disponible.

                                                                                                                              Crédit : End FGM European Network, 2021 - utilisation équitable

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Les MGF sont maintenant reconnues comme un enjeu de santé publique important en contexte occidental (Andro et Lesclingland, 2016; Atkinson et al., 2019). Le Canada a notamment reconnu le vacation cutting comme un acte criminel et les MGF comme une forme de voie de fait grave en 1997 (Gouvernement du Canada, 2022). Néanmoins, au moment de la publication de cette chronique, il n’existe aucune donnée quantitative sur les MGF au Canada (OHRC, 2009; TCRI, 2020)4. La Commission ontarienne des droits de la personne (OHRC, 2009) mentionne la « nature » des MGF comme un obstacle à la récolte de données, une justification plus que floue.

La conceptualisation restreinte des MGF

Les MGF sont perçues comme une forme de discrimination à l’égard des femmes et comme représentant une iniquité profonde entre les sexes (OMS, 2022a). Elles sont considérées comme une violation

  • des droits des enfants, des jeunes filles et des femmes;
  • des droits à la santé;
  • des droits à la sécurité;
  • des droits à l'intégrité physique;
  • du droit d'être à l'abri de la torture et de traitements cruels, inhumains ou dégradants;
  • du droit à la vie, considérant que les MGF peuvent avoir des conséquences mortelles (OMS, 2022a).

Étonnamment, elles ne sont pas traitées comme une menace ou une violation des droits sexuels. En fait, autant dans le milieu activiste que dans le milieu de la recherche, les concepts spécifiques de santé sexuelle ou de droits sexuels ne sont que très rarement utilisés en lien avec les MGF. Ceci peut potentiellement être expliqué par le fait que le droit à la santé, selon les définitions, peut englober les droits sexuels et génésiques (OMS, 2022b). Une autre hypothèse plausible, non documentée mais observée sur le terrain, serait liée au malaise de traiter de sujets liés à la sexualité – on préfère considérer les enjeux reliés aux MGF comme des enjeux de santé globale ou de droits de la personne uniquement.

De façon similaire, les actrices et acteurs clés dans la lutte contre les MGF pourraient être réticent.e.s à inclure les enjeux liés à la sexualité dans leurs actions et leurs discours pour ne pas nuire aux efforts visant à éradiquer les MGF. En effet, des efforts anti-MGF mettant de l’avant l’importance des droits sexuels, en abordant par exemple l’agentivité et la liberté sexuelles, pourraient être perçus comme pouvant renforcer la pratique des MGF plutôt que de l’éradiquer, considérant que les MGF sont fréquemment perpétrées dans le but même de contrôler la sexualité des femmes (Perron et al., 2020). Autrement dit, il peut être perçu comme contestable d’axer des efforts sur une prémisse d’émancipation sexuelle des femmes si la pratique des MGF est réalisée justement pour empêcher cette dite émancipation. Les actions anti-MGF actuelles visent plutôt à mettre en lumière les conséquences délétères des MGF sur la santé globale, en abordant rarement la sexualité.

Absence criante de connaissances

Comme mentionné plus tôt, les MGF sont souvent considérées comme un enjeu de droits ou encore de santé physique, mentale ou globale. La santé reproductive, gynécologique, obstétricale ou maternelle est aussi extrêmement représentée dans les écrits scientifiques. Par contre, la santé sexuelle, elle, reste quasi absente. Lorsqu’elle est abordée, c’est souvent avec un cadre biomédical, dans une perspective quantitative, qui est très axée sur les conséquences physiologiques des MGF. Ainsi, les conséquences physiques sont mises de l’avant et l’accent est mis sur la génitalité. Pourtant, la santé sexuelle, bien qu’un concept relativement récent et encore flou (Epstein, 2022), comporte plusieurs dimensions et ne se limite pas uniquement à la génitalité (DRSP, 2018). Ses composantes restent à l’heure actuelle très peu étudiées chez les personnes ayant eu une MGF.

                                                                                                                        Exercice bibliométrique

En utilisant uniquement le descripteur (MeSH term, soit le terme utilisé pour indexer des articles dans la base de données MEDLINE) associé aux MGF, soit « circumcision, female », on obtient 1 646 résultats. Si on combine ce descripteur avec le descripteur « sexual health », on réduit drastiquement le nombre de résultats à 4. Ce nombre remonte à 159 si on combine « sexual health » avec « sexual behavior » et « sexuality ». Dans tous les cas, le nombre de résultats est extrêmement bas. Bien que cet exercice soit très simpliste, il permet de montrer à quel point les MGF sont rarement conceptualisées dans une perspective de santé sexuelle.

                                                                                                            Crédit : capture d’écran fournie par l’autrice – recherche effectuée le 29 janvier 2023

De plus, dans bien des cas, les études touchant à certains aspects de la santé sexuelle ne portent pas spécifiquement sur ceux-ci. En effet, les résultats et les conclusions en lien avec la santé sexuelle s’avèrent souvent fortuits, ou ne sont simplement pas l’objet d’étude principal.

De surcroît, beaucoup d’études touchant à un ou à plusieurs aspects de la sexualité se concentrent sur les effets négatifs des MGF, par exemple sur la douleur que peuvent ressentir les personnes ayant eu une MGF au niveau de leurs organes génitaux, notamment lors de relations sexuelles. Ceci peut s’avérer tout à fait logique et légitime : après tout, les MGF n’ont aucun bienfait sur la santé (OMS, 2022a).

Néanmoins, de se limiter à cette perspective sans prendre la peine d’explorer d’autres paradigmes offre une vision partiale et partielle de l’impact des MGF sur la santé sexuelle.

Des équipes de recherche critiquent justement cette vision erronée, sensationnaliste et exagérément négative de la sexualité des personnes ayant eu une MGF. Dans une revue de littérature, Johnsdotter et Essén (2016) indiquent que bien que des études rapportent l’impact négatif des MGF sur la sexualité, d’autres ont pu conclure que les MGF avaient, en soi, peu d’impacts sur la sexualité des femmes.

Ainsi, il est possible de dire qu’il existe très peu de données concernant la sexualité et les MGF, et que les données existantes ne présentent malheureusement qu’un portrait incomplet de la santé sexuelle des personnes ayant eu une MGF.

Dès lors, outre la pratique même des MGF qui est une menace à l’intégrité et l’autonomie corporelles et sexuelles des femmes et aux droits fondamentaux de la personne, l’absence d’études, et donc de connaissances, sur la santé sexuelle globale est, en soi, une atteinte aux droits sexuels des femmes.

Ce manque de connaissances et de données probantes pose une barrière non négligeable au développement d’interventions de promotion de la santé sexuelle chez les femmes, ce qui perpétue en quelque sorte les iniquités sociales, de genre et de santé auxquelles les personnes ayant eu une MGF font face.

À la lumière de ce constat, j’ai réalisé une étude informelle exploratoire afin de sonder les besoins du terrain. Après avoir échangé avec des chercheurs et chercheuses, des intervenant.e.s du milieu psychosocial et des professionnel.le.s de la santé, j’ai mis sur pied un projet de recherche qualitatif visant à 1) comprendre comment les femmes ayant eu une MGF perçoivent leur sexualité et, 2) identifier leurs besoins en termes de soins de santé sexuelle pour informer les services existants et futurs leur étant adressés. Bien que l’étude soit toujours en cours de recrutement, les données et analyses préliminaires permettent d’émettre plusieurs constats intéressants quant aux déterminants de la santé sexuelle des personnes ayant eu une MGF.

Étude en cours
Afin de répondre aux lacunes en termes de connaissances liées à la santé sexuelle de personnes ayant eu une MGF, je mène présentement un projet de recherche dans le cadre de mon doctorat. Ce projet a pour but d’explorer la perception des femmes ayant eu une MGF et vivant au Canada au sujet de leur sexualité afin d’informer les services et ressources en santé sexuelle.

Les femmes âgées d’au moins 18 ans, ayant eu une MGF et vivant actuellement au Canada sont invitées à participer au projet. La participation consiste en une entrevue individuelle et confidentielle d’un maximum de 90 minutes réalisée en anglais ou en français par téléphone, par Zoom ou en personne (Montréal ou Ottawa). Au cours de l’entrevue, plusieurs sujets en lien avec la santé sexuelle seront abordés en fonction de ce que la participante souhaite dévoiler (p. ex. éducation à la sexualité reçue, utilisation des services en santé sexuelle, relations interpersonnelles). Une compensation de 45 $ est prévue pour chaque participante. 

Pour plus d’information, lisez un descriptif de l’étude en cours

Pour participer ou pour en savoir plus, contactez-moi par courriel ou par téléphone (514 994-7081). 

À noter que le projet a été approuvé par le Comité d'éthique de la recherche en sciences et en santé de l’Université de Montréal (CERSES-21-002-D), par le Comité d’éthique de la recherche au CHU Sainte-Justine (2022-3896) ainsi que par le Comité d’éthique de la recherche du CIUSSS-du-Centre-Ouest-de-l’Île-de-Montréal (MEO-21-2022-3260, MP-21-2022-3896).

Une pluralité d’expériences

La pluralité des expériences des participantes est indéniable et il serait impossible, et surtout non souhaitable, de dire que les femmes ayant eu une MGF partagent une seule et même réalité en termes de sexualité. Il est dangereusement facile de généraliser l’état de santé sexuelle des femmes ayant eu une MGF, en centrant exclusivement leur sexualité autour de cette dernière. La santé sexuelle de chaque participante apparaît comme davantage influencée par son propre vécu que par le fait qu’elle fasse partie d’un groupe de femmes ayant eu une MGF.

Déterminants de la santé sexuelle

Plusieurs facteurs apparaissent comme déterminants pour la santé sexuelle des femmes ayant eu une MGF, dont l’accès à l’information concernant la santé sexuelle et l’éducation à la sexualité reçue tout au long de la vie. Même si aucune participante n’a reçu d’éducation à la sexualité formelle durant l’enfance et l’adolescence, certaines ont pris l’initiative de faire leur propre éducation en consultant différentes sources d’information. La volonté d’avoir accès à de l’information fiable semblait indiquer un certain désir de comprendre sa sexualité pour pouvoir agir sur celle-ci en reprenant le contrôle sur son corps. À ceci s’ajoutent les expériences relationnelles et amoureuses passées. Les participantes ayant eu des partenaires ouvert.e.s à la discussion, à l’écoute de leurs besoins, prêt.e.s à explorer certains aspects de la sexualité semblaient avoir une définition plus large de la santé sexuelle et un désir d’améliorer ou de favoriser celle-ci.

Un autre déterminant majeur s’avère être la migration des participantes. Pour plusieurs, le fait d’immigrer au Canada a permis une certaine distance avec les us et coutumes du pays natal, mais surtout avec les membres de la famille et de la communauté qui, dans bien des cas, exercent beaucoup de pression sur la vie des femmes. Selon les participantes, cette distance a laissé la place aux remises en question et à l’introspection sexuelle. La littérature scientifique disponible sur le sujet confirme que la perception de la santé sexuelle, du bien-être sexuel et de la sexualité en général évoluent selon la trajectoire migratoire (Ahmadi, 2003; Johnsdotter, 2018; Shirpak et al., 2007).

Remettre en question les narratifs dominants

Force est de constater que la représentation dominante confine souvent les femmes ayant eu une MGF à une position de victime. On peut notamment le voir par le vocabulaire entourant les MGF : subir une MGF et ses conséquences, être victime de MGF, etc. C’est une posture qui est souvent mise de l’avant dans les efforts anti-MGF. Cette représentation a effectivement été adoptée par certaines participantes de l’étude. En revanche, d’autres ont fermement rejeté ce statut souvent imposé. Le positionnement en tant que victime, survivante ou autre, semble progresser au cours de la vie et en fonction de l’évolution de chaque femme. Dès lors, il importe de remettre en question le narratif actuel, unique et dominant, en reconnaissant les femmes ayant eu une MGF comme étant des agentes sexuelles actives capables de faire preuve d’agentivité sexuelle, et non pas en tant que victimes passives.

Les résultats, préliminaires pour le moment, permettront d’obtenir des données canadiennes mettant de l’avant la voix et la perception des femmes concernées par les MGF quant à la santé sexuelle et les besoins en termes de soins de santé sexuelle. C’était notamment une des recommandations issues de la plus récente directrice clinique de la Société des obstétriciens et gynécologues du Canada datant de 2020 (Perron et al., 2020). Ainsi, ce projet de recherche vise non seulement à explorer la perception des femmes ayant eu une MGF quant à leur santé sexuelle, mais revendique également que la promotion de la santé sexuelle soit mise au cœur des outils, ressources, projets, initiatives et campagnes en lien avec les MGF.

 

L’autrice tient à remercier chaleureusement toutes les personnes ayant accepté de participer à ce projet de recherche jusqu’à présent.


Pour en apprendre davantage sur les MGF et les outils, ressources et projets en cours sur le sujet, consultez le dossier complet. Pour en apprendre plus sur les aspects sexologiques liés aux MGF, il est possible de s’inscrire gratuitement à la toute nouvelle série sexo lancée par le GAMS Belgique le 30 janvier dernier comportant six ateliers en ligne.

Notes
1 À l’heure actuelle, il n’existe pas de consensus par rapport au terme à préconiser en français pour désigner cette pratique (Perron et Senikas, 2016). Il est monnaie courante de voir un paragraphe explicatif justifiant la terminologie utilisée dans les rapports, articles, ou textes divers abordant les MGF.

Jusqu’à tout récemment, le terme utilisé par l’OMS était « mutilation génitale féminine ». Depuis 2022, l’OMS utilise toutefois le terme « mutilations sexuelles féminines », peut-être dû au fait que le terme « mutilation génitale » se trouve de plus en plus utilisé dans le milieu communautaire et activiste pour désigner un type de violence obstétricale et gynécologique (p. ex. épisiotomie non consentie) ou encore les interventions chirurgicales réalisées sur des patient.e.s pédiatriques intersexes. Cette similarité entre les termes ou l’utilisation des mêmes termes pour désigner des réalités différentes peut poser de nombreux problèmes, comme lorsqu’un projet de loi états-unien assimilait « MGF » et « soins de santé » pour les personnes trans (Cariboni et Bauer, 2022).

Les termes « mutilation génitale féminine » et « mutilations sexuelles féminines », par la présence du mot « mutilation », ont « l’avantage » de mettre de l’avant la gravité de cette pratique (Perron et Senikas, 2016). Néanmoins, ces deux termes peuvent être considérés comme problématiques, car ils peuvent laisser entrevoir une connotation stigmatisante et moralisatrice (Perron et Senikas, 2016). De plus, certaines personnes ayant eu une MGF trouvent l’utilisation du mot « mutilation » inapproprié, entre autres parce qu’il peut créer ou exacerber un sentiment d’incomplétude, voire de handicap (Koukoui, 2020).

Le terme « circoncision féminine », fréquemment utilisé en recherche et dans plusieurs communautés, est aussi critiqué vu le parallèle inadéquat fait avec la circoncision « masculine » (ablation partielle ou totale du prépuce du pénis). Fait intéressant, le descripteur pour désigner les MGF dans les bases de données MEDLINE, CINAHL, PubMed est « circumcision, female ».

De plus, l’ajout du mot « féminine » aux différents termes d’usage pose parfois problème considérant que certaines personnes ayant eu une MGF ne s’identifient pas comme femmes.

Enfin, le terme « excision » utilisé pour décrire l’ensemble des MGF apparaît aussi problématique considérant qu’il désigne plutôt un seul des quatre types de MGF possibles. Malgré tout, c’est le terme qu’utilise la Société des obstétriciens et gynécologues du Canada selon sa plus récente directive datée de février 2020, qui recommande l'utilisation de l’expression « excision génitale féminine » (Perron et al., 2020).

Cela dit, étant donné que le terme « mutilation génitale féminine » semble encore être le plus répandu dans le langage courant et que la Journée internationale contre les MGF comporte explicitement ce terme, c’est ce dernier ainsi que son acronyme (MGF) qui est utilisé tout au long du dossier duquel fait partie cette chronique.

À noter qu’en anglais, plusieurs termes sont aussi possibles :

  • (Female) genital mutilation (FGM)
  • (Female) genital circumcision
  • (Female) genital cutting (FGC)
  • Excision
  • Des combinaisons : FGM/C (female genital mutilation, cutting or circumcision), FGC/M (female genital cutting, circumcision or mutilation)
  • etc.

2 Bien que les personnes ayant eu une MGF ne s’identifient pas toutes comme femmes, c’est le terme qui est utilisé par l’OMS, l’ONU ainsi que la quasi totalité des écrits scientifiques. Il est primordial de reconnaître que des personnes ayant des vulves et ayant eu une MGF peuvent avoir une identité de genre différente. C’est notamment le cas de Dena qui a témoigné dans le cadre de la campagne Voices to End FGM/C de Sahiyo

Néanmoins, dans le cadre de ce dossier, les termes « femmes », « filles » et « fillettes » seront utilisés à plusieurs reprises, entre autres parce que les résultats préliminaires présentés dans ce texte sont issues d’entrevues réalisées auprès de personnes s’auto-identifiant toutes comme femmes cisgenres.

3 Des raisons d’ordre religieux sont aussi souvent invoquées, mais il a été établi à maintes reprises qu’aucun texte religieux ne prescrit ou n'encourage cette pratique (OMS, 2022a). 

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Références
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Amendement - 5 février 2024

4Un rapport de Statistique Canada paru en septembre 2023, soit sept mois après la publication de cette chronique, estime qu'il y a entre 95 000 et 61 000 filles et femmes au Canada qui ont eu une MGF ou qui sont à risque d'en subir (Findlay et al., 2023).

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Pour citer cette chronique:

Gareau, E. (2023, 6 février). Mutilations génitales féminines : un plaidoyer pour la santé sexuelle. Les 3 sex*. https://les3sex.com/fr/news/2497/chronique-mutilations-genitales-feminines-un-plaidoyer-pour-la-sante-sexuelle-

mutilation génitale féminine, circoncision féminine, mutilation sexuelle, excision, infibulation, violence, droit, vulve, autonomie, liberté, agentivité, recherche

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