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L’engagement des pères dans la santé sexuelle et reproductive de leur fils

10 janvier 2019
Karolanne O'Keefe
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Date de publication
Janvier 2019

Résumé original
Malgré les efforts en cours pour promouvoir la santé sexuelle et reproductive (SSR), les adolescent.e.s continuent à adopter des comportements sexuels à risque. Près de 60 % des lycéen.ne.s ont eu des relations sexuelles, mais seulement 54 % des adolescent.e.s sexuellement actifs ou actives déclarent avoir utilisé un préservatif lors de leur dernier rapport sexuel, contre 62 % en 2005. Parallèlement, les taux de maladies sexuellement transmissibles augmentent considérablement chez les adolescent.e.s et plus rapidement chez les garçons que chez les filles. Une analyse récente des centres de contrôle et de prévention des maladies a révélé qu'au cours des quatre dernières années, le nombre de diagnostics de gonorrhée a augmenté de 67 % et celui de syphilis de 76 %. Près de 2,3 millions de nouveaux cas de chlamydia, de gonorrhée et de syphilis ont été diagnostiqués en 2017 seulement, ce qui bat le record précédent de 2016. Il est clair que de nouvelles approches sont nécessaires pour faire face à ces tendances.

Le paysage de la SSR évolue rapidement; les options en matière de contraception sont en train de changer et les jours des classes de santé et des manuels scolaires s’achèvent, alors que les adolescent.e.s se tournent de plus en plus vers leurs téléphones portables et vers Internet pour s'informer. Alors que la culture de la SSR évolue, notre tactique d'éducation en matière de santé sexuelle doit changer. Dans ce numéro de Pediatrics, Guilamo-Ramos (et al.) identifie une ressource pour la SSR qui n'est ni nouvelle ni choquante; en fait, c'est plutôt le contraire. C'est une ressource simple qui a toujours existé : le père. Les impacts des pères sur la santé et le bien-être de leurs enfants sont largement documentés, mais les pères sont souvent négligés en tant que contributeurs à la SSR de leurs enfants. Aux États-Unis, 27 millions de garçons de moins de 18 ans vivent avec un père; Guilamo-Ramos (et al.) fait un premier pas en examinant la faisabilité et l'acceptabilité d'engager plus efficacement les pères et leurs fils dans la SSR.

Dans le cadre de cette étude, les équipes de recherche ont interrogé 25 couples père-fils vivant dans le Bronx. Elles ont analysé leur communication sur l'utilisation du préservatif et mis au jour des thèmes communs relatifs aux préférences, aux obstacles et aux possibilités d'éducation concernant le préservatif entre pères et fils. Elles rapportent que les pères et les fils souhaitent avoir plus de discussions sur l'utilisation du préservatif, mais que les pères estiment qu'ils ont besoin de meilleures compétences en communication et d'une plus grande éducation pour pouvoir le faire efficacement. Les auteur.e.s vont plus loin en fournissant un tableau de suggestions programmatiques pour des interventions centrées sur le père conçues pour aider les adolescents.

Le message central de l’étude (à savoir que les adolescents veulent que leur père parle de l’utilisation du préservatif) est profond. Les pères savent intuitivement qu’il s’agit d’un sujet difficile à aborder. Malgré le manque de connaissances, ils possèdent néanmoins des aptitudes innées à la communication qui peuvent être soutenues et renforcées, tels que l’utilisation de l’humour et le fait de lancer la conversation à un moment propice. Pourtant, plusieurs questions clés de suivi se dégagent de ce travail. Quelles sont les options disponibles pour les fils vivants dans des foyers sans père? Comment pouvons-nous atteindre les pères pour les éduquer et les responsabiliser pour qu'ils soient des éducateurs efficaces en matière de santé sexuelle auprès de leurs fils? Où les pères peuvent-ils se tourner pour obtenir des informations fiables à transmettre à leurs fils?

Les prestataires de soins pédiatriques correspondent déjà à ce rôle. En tant que ressource communautaire de confiance souvent située dans les cliniques en milieu scolaire et chargée d'administrer des vaccinations fréquentes aux adolescent.e.s, les prestataires de soins pédiatriques constituent une ressource fiable et accessible pour les pères. L'« American Academy of Pediatrics » a récemment publié des directives actualisées concernant l'éducation à la SSR pour les prestataires de soins pédiatriques. Cette publication fournit des informations et des méthodes que les prestataires de soins pédiatriques peuvent appliquer lors des visites de patient.e.s et inclut des ressources que les parents peuvent utiliser pour poursuivre la discussion à la maison. Connaître personnellement un adolescent et son père, ainsi que la dynamique de leur relation, donne aux prestataires de soins pédiatriques la possibilité d’enseigner aux pères comment parler à leurs fils de l'utilisation du préservatif et d'autres sujets liés à la SSR.

Dans un même temps, les clinicien.ne.s peuvent ne voir les adolescent.e.s qu'une seule fois par an lors d'un contrôle de santé. Selon une étude, les clinicien.ne.s ne passent en moyenne que 36 secondes à parler de sexualité aux adolescent.e.s lors de ces visites. De plus, même si les faits montrent qu’un nombre important de pères assistent aux visites des enfants plus jeunes, les parents n’accompagnent pas toujours les adolescent.e.s et il peut donc être difficile de discuter de santé sexuelle et reproductive avec les pères lors de ces visites. Par conséquent, il est nécessaire d'identifier des moyens d'impliquer les pères dans la SSR au-delà de l'interaction traditionnelle médecin-patient.e. Des campagnes de santé publique pourraient être utilisées pour encourager les pères à communiquer avec leurs fils à propos de l'utilisation du préservatif et pour les orienter vers des ressources pédagogiques utiles. Les partenariats avec des écoles, des groupes communautaires ou des équipes sportives d’adolescent.e.s (lieux où les adolescent.e.s et les parents sont souvent déjà en interaction) peuvent être un bon point de départ. En outre, Internet devenant de plus en plus une source d’éducation pour la santé, le recours à des sites Web, à YouTube ou aux médias sociaux pour fournir des informations fiables et appropriées peut constituer un moyen précieux de dialoguer avec les pères sur ce sujet.

À mesure que la SSR évolue, les expériences et les points de vue uniques des adolescents de sexe masculin sont de mieux en mieux reconnus et compris. Guilamo-Ramos (et al.) nous ramènent à la base, nous rappelant que les pères peuvent être une ressource sous-utilisée pour les garçons adolescents, sensibilisés à l'utilisation du préservatif et dignes de soutien. Donner aux pères le pouvoir d’éduquer leurs fils non seulement sur l’utilisation du préservatif, mais aussi sur la santé sexuelle et l’éducation à la santé en général est une étape essentielle pour les clinicien.ne.s qui s’occupent des adolescents de sexe masculin et de leurs familles.

Référence
Lucey, K. et F. Garfield, C. (2019). Fathers’ engagement in their sons’ sexual and reproductive health. Pediatrics, 143(1). DOI : 10.1542/peds.2018-2595.

Pour accéder à la production scientifique entière
http://pediatrics.aappublications.org/content/143/1/e20182595 

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