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Témoignage • Les enfants, ce n’est pas pour moi!

19 septembre 2019
Sara
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Les témoignages sont des textes produits par des personnes ne provenant pas obligatoirement des disciplines sexologiques ou connexes. Ces textes présentent des émotions, des perceptions et sont donc hautement subjectifs. Les opinions exprimées dans les témoignages n'engagent que leurs auteur.e.s et ne représentent en aucun cas les positions de la revue.

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« Tu ne veux pas d’enfants!? Ben voyons! Tu es encore trop jeune pour le savoir! »

J’ai 22 ans. Deux secondes plus tôt, je croyais être une adulte. Jeune adulte, c’est vrai, mais une adulte qui est quand même capable de prendre ses propres décisions.

Chaque fois qu’on me fait ce genre de remarque, j’ai une rage qui monte en moi, mais je dois rester calme devant cette personne qui croit connaître mes sentiments et mes intentions mieux que moi (ce qui m’arrive trop souvent). 

Pourquoi le fait de ne pas vouloir d’enfants semble si improbable? Des raisons, j’en ai plusieurs :

• Je n’ai pas envie d’avoir un être vivant dans mon ventre;
• Je n’ai pas envie d’accoucher (Je dois avouer que ce qui est dit sur l’accouchement m’apparaît rarement positif et m’effraie);
• 
Je n’ai pas envie d’arrêter de dormir la nuit pendant six mois pour nourrir un petit être vulnérable et lui laver les fesses;
• Je n’ai pas envie d’arrêter de travailler pour devoir m’occuper d’un.e enfant 24 heures sur 24 pendant un an;
• Je n'ai pas envie d'argumenter avec un petit être humain sur des sujets qui ne méritent pas d'argumentation;
• Je n’ai pas envie de prévoir ma vie en fonction d’un.e enfant;
• Je n’ai pas envie d’éduquer un être humain;
• Je n’ai pas envie de me priver pour être capable de combler les besoins d’un.e enfant;
• Je n’ai pas envie de devoir gérer des crises interminables provenant de sources inconnues;
• Je n’ai pas envie d’avoir un.e enfant… C’est tout! Je suis tannée de me justifier!

Je sais pourtant que peu importe mes raisons, on me répondra probablement :

• « Mais il y a plein de côtés positifs que tu ne vois pas! »
• « Mais c’est si beau des enfants! »
• « Moi non plus, j’en voulais pas avant! »
• « Tu vas voir, un jour, l’horloge biologique va sonner! »
• « Mais qui va s’occuper de toi quand tu vas être vieille? »
• « Ton chum dit quoi de ça? »
• « Tes parents ne seront pas grands-parents! Ils doivent être déçu.e.s! »

Ça, ce sont les arguments des autres, pas les miens!

J’ai donc plusieurs raisons qui m’incitent à ne pas en vouloir, mais il y a aussi le côté émotif… Ce sentiment profond que j’ai en moi depuis que je suis toute jeune : les enfants, ce n’est pas pour moi.

Quand j’étais petite, je jouais à l’école et je m’imaginais être une étudiante. J’ai toujours détesté jouer à la maman, je ne savais pas quoi faire avec les bébés et m’imaginer avoir un enfant m’énervait. Croyez-moi, le fait que je ne veuille pas d’enfants date de longtemps! Ce n’est pas une idée comme ça que je lance, c’est quelque chose auquel j’ai réfléchi. J’ai pesé les pour et les contre et j’en ai discuté avec des gens. Je sais ce que je veux et ce n’est pas des enfants.

J’ai toujours eu ce sentiment qu’avoir un.e enfant ne me permettrait pas de m’accomplir. J’ai plein de projets pour l’avenir : pour mes études, pour mon travail, pour des voyages avec ma famille, mon chum et mes ami.e.s. Penser à ces projets m’apporte du bonheur et l’envie de foncer dans la vie.

Mais penser à avoir des enfants… La peur et l’anxiété montent, mes idées de projets tombent. Je ne suis pas capable de m’imaginer un avenir, mon cerveau bloque! Des fois, je me mets aussi à réfléchir à l’avenir de ce petit être que je mettrais au monde… Je trouve ça dramatique, mais je ne peux m’empêcher d’y penser.

• Et si je le mettais au monde et qu’il avait une vie malheureuse?
• Et s’il se faisait intimider?
• Et s’il lui arrivait des malheurs face auxquels je serais impuissante?
• Et si les changements climatiques s'accélèrent, avec toutes les conséquences venant avec ceux-ci?

Ce petit humain n’aurait pas choisi d’être au monde et moi, je serais incapable de l’aider. Dans ces moments-là, je me dis que je serais égoïste de lui imposer la vie. D’un autre côté, je suis aussi égoïste de ne pas le vouloir, car j’ai envie de choisir ma vie en fonction de mes désirs et non des siens.

Je trouve incroyables les personnes qui font le choix de se dévouer à un petit bout d’humain, mais m’imaginer dans cette situation provoque une boule au fond de mon estomac. Un sentiment de peur et d’inconfort monte en moi.


J’aime les enfants, je les trouve mignon.ne.s et drôles avec leurs petits yeux brillants et leurs réflexions farfelues. J’adore passer du temps avec ma nièce ou avec les enfants de mon entourage. Mais cinq heures maximum! Après cinq heures, je n’en peux plus, je ne souhaite que redonner l’enfant à son parent pour ensuite retourner dans le confort de mon petit appartement et me coller tranquille avec mon chum, sans enfant qui me crie après pour recevoir mon attention.

Ma réflexion est arrivée au stade de la stérilisation.

Au début, je m’imaginais apprendre que j’étais infertile. J’éprouvais un sentiment de satisfaction à savoir que je pourrais l’être en me disant que cela m’aiderait sur bien des points, tels qu’arrêter de craindre de tomber enceinte ou de devoir penser à prendre ma pilule chaque jour. Je crois que c’est suite à cette constatation que j’ai été certaine de mon choix de ne pas vouloir d’enfants. Maintenant, je me dis que ce pourrait être mon choix : je pourrais demander à un.e médecin la ligature des trompes.

Une partie de moi pense que ce serait simple, que j’aurais seulement à en faire la demande et que tout serait réglé. Toutefois, une autre partie de moi n’a pas envie d’argumenter face au fait que j’ai « seulement » 22 ans. Je n’ai également pas envie de l’annoncer à mon entourage, parce que malgré que ce soit ma décision, je sais que plusieurs personnes autour de moi vont réagir comme si c’était un choix qui les concernait. Je vais devoir m’expliquer, me justifier, répéter (et répéter) mes arguments ainsi qu’exposer mes sentiments sans cesse. Simplement à y penser, je suis déjà fatiguée…

Je sais que ce que je dis peut sembler irrationnel et incompréhensible pour plusieurs. C’est correct. Je ne demande à personne de comprendre. Je veux simplement arrêter de me faire regarder avec des yeux ronds, comme si j’étais complètement folle, comme si je n’étais pas une femme normale, car je ne ressens pas le besoin d’avoir une descendance.

Tout ce que je souhaite, c’est d’avoir droit à mon opinion. Je ne comprends pas le désir des autres d’avoir des enfants, et pourtant, je n’ai jamais dit à personne, scandalisée :

« Tu veux des enfants!? Ben voyons! Tu es encore trop jeune pour le savoir! Tu vas changer d’idée! »

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D'autres témoignages sont disponibles dans le dossier « Childfree : entre liberté et stigmatisation ». N'hésitez pas à consulter le dossier en entier pour en connaitre plus sur cette réalité.

Consulter le dossier « Childfree : entre liberté et stigmatisation »
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