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Roman • En finir avec Eddy Bellegueule

3 février 2021
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En finir avec Eddy Bellegueule est le premier roman d'Edouard Louis. Il y relate son enfance et son adolescence en Picardie, une région marquée par la pauvreté dans le nord de la France, durant laquelle il ne parvient pas à respecter les codes sociaux masculins et hétéronormatifs de l’école, de la famille et du village. Le récit se termine avec son entrée au lycée Michelis, fuyant ainsi les violences de son milieu d’origine.

Né Eddy Bellegueule en 1992 et surnommé Édouard par ses camarades au lycée, l’auteur et traducteur français parvient à changer son nom en 2013, marquant une rupture avec le monde de l’enfance. Il est connu pour avoir dirigé l’ouvrage Pierre Bourdieu. L’insoumission en héritage aux éditions PUF et pour l’écriture de deux autres romans, Histoire de la violence (2016) et Qui a tué mon père (2018). Par ailleurs, il a signé avec Geoffroy de Lagasnerie, également sociologue, plusieurs lettres ouvertes contre des politicien.ne.s de la droite française.

En combinant un regard sociologique et un art du récit intime, Édouard Louis témoigne de la masculinité hégémonique et de l’homophobie. Plus précisément, dans la seconde partie du roman, Eddy Bellegueule découvre sa sexualité avec de jeunes adolescents de son âge, mais lorsqu’ils se font attraper, Édouard Louis révèle les mécanismes oppressifs de l’hétéronormativité : « jouer aux homosexuels était une façon pour eux de montrer qu’ils ne l’étaient pas (p. 138) [...] « le crime n’est pas de faire, mais d’être. Et surtout d’avoir l’air. » (p. 152). S’en suit alors plusieurs tentatives de performer l’hétérosexualité, passant par la rencontre de deux filles qu’il séduit en se conformant aux « codes », une lettre d’amour comportant les cases « Oui » et « Non » à la question « Veux-tu sortir avec moi? », une invitation à s’embrasser dans le pré durant la récréation, réussissant à masquer momentanément son désir pour les hommes. Eddy Bellegueule ne maintient cependant pas la mascarade longtemps : « Mon corps n’a plus cessé de se rebeller contre moi, me rappelant à mon désir » (p. 167). Il ne lui restait plus qu’une seule option, fuir le village et la famille en accédant au lycée Michelis, esquissant les débuts d’un parcours de transfuge de classe sociale.

Eddy Bellegueule découvre là-bas une nouvelle masculinité, loin de celle des « durs » du village : « [les lycéens] ont des façons délicates / tous auraient pu être traités de pédés au collège / les bourgeois n’ont pas les mêmes usages de leur corps / ils ne définissent pas la virilité comme mon père » (p. 201). Cette scène finale, en ouvrant vers un nouveau milieu socio-économique et de nouvelles formes de masculinité, révèle ce qui constitue l’un des intérêts centraux du roman : la mise en scène de l’intersection entre genre et classe.

Référence

Auteur : Édouard Louis
Titre : En finir avec Eddy Bellegueule
Date de parution : 2 janvier 2014
Maison d’édition : Seuil

Ce livre est disponible à la Grande bibliothèque (BAnQ) en format papier ou en format numérique. Il est également possible de se le procurer en librairie au coût de 13,95 $. 

homosexualité, masculinité, classe sociale, homophobie, hétéronormativité, roman, autofiction, pauvreté