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Roman • Frankissstein

11 février 2021
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Une atmosphère dramatique, une créatrice, sa créature. Un jeune chirurgien trans, un trafic de membres humains, un chef de file de l’intelligence artificielle. Des robots sexuels. Des êtres humains qui interrogent leur conscience et leur cœur pour tenter de percer les mystères de leur existence, de leur condition, de leur avenir. Le descriptif du roman Frankissstein a de quoi piquer la curiosité. Nulle coïncidence si le titre du roman rappelle Frankenstein, le personnage devenu classique et maintes fois repris dans la culture populaire : le roman nous projette au cœur de la genèse de cette œuvre marquante de la littérature gothique anglaise, mise en parallèle avec une histoire plus contemporaine, voire futuriste. Les échos entre ces récits mettent en lumière l’actualité de la vie conjugale et littéraire de Mary Shelley. 

Née à Manchester en 1959, Jeanette Winterson, l’autrice de Frankissstein, a été élevée par ses parents adoptifs dans une petite ville au nord de l’Angleterre. Pentecôtistes, ils ne gardaient que des livres religieux à la maison. Jeanette dut quitter le foyer familial à 16 ans lorsqu’elle se découvrit homosexuelle. Elle a occupé plusieurs petits boulots avant de publier son premier livre, Oranges Are Not The Only Fruits, en 1985. Par la suite, elle a continué à écrire des livres (plus d’une douzaine), en plus de chroniques dans des journaux britanniques, incluant The Times et The Guardian. Depuis 2012, elle enseigne l’écriture à l’Université de Manchester. 

En tant que personne concernée par la non-binarité, le roman a parfois déçu les attentes que j’avais par rapport à une œuvre qui promettait un contenu queer. L’imaginaire érotique qui s’y déploie hérite lourdement du phallocentrisme et l’exploitation de la transidentité du personnage m’a semblée parfois maladroite, à la limite de la fétichisation. Certains moments de la romance qui se joue ainsi que les réflexions féministes sur l’amour libre et la condition sociale des femmes l’ont partiellement racheté à mes yeux. Je mettrais en garde par rapport à des déclencheurs possibles : l’un des personnages, archétype de l’homme d’affaires macho, tient des propos sexistes et transphobes, et un autre personnage fait l’expérience d’une agression sexuelle transphobe.

Frankissstein pose de nombreuses questions sur le statut de la réalité et de la fiction, l’amour, l’intelligence, la transformation, la création, la folie, la mort. Winterson signe un roman foisonnant, où les réseaux d’images et les questionnements (trop appuyés à mon goût) croisent une abondance de références chansonnières, littéraires, philosophiques, cinématographiques, mythologiques et en lien avec la culture scientifique. Il attise la curiosité et donne tout particulièrement envie de se replonger dans le classique de Mary Shelley.

Référence

Auteur.e : Jeanette Winterson
Titre : Frankissstein
Date de parution : 11 janvier 2021
Maison d’édition : Alto

Ce livre est disponible à la Grande bibliothèque (BAnQ). Il est également possible de se le procurer en librairie au coût de 29,95 $. 

roman, science-fiction, transidentité, robot, posthumanisme, Frankenstein, technologie, féminisme, amour libre, intelligence artificielle