À l’ami qui ne m’a pas sauvé la vie (surface du livre) – Photo modifiée par Les 3 sex* – Utilisation équitable

Roman • À l’ami qui ne m’a pas sauvé la vie

18 juin 2021
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« J’ai eu le sida pendant trois mois. » 

Dès la première phrase, Hervé Guibert donne le ton. Son livre parle de lui-même, de sa maladie, mais surtout de la façon dont il l’a vécue. On y découvre le portrait psychologique d’un homme dont le VIH a complètement transformé sa vie en teintant chacune de ses relations, qu’elle soit professionnelle, amoureuse ou amicale. 

Ce roman d'autofiction relie entre elles les histoires de plusieurs protagonistes se situant presque tou.te.s soit du côté des malades, soit des médecins. Le livre lui-même est séparé en deux parties dont l’une décrit avec beaucoup d’amour, de respect et de tendresse les derniers mois de vie de Muzil (alias Michel Foucault¹), ami et voisin d’Hervé Guibert, alors que la deuxième rend compte de l’aventure de Bill, autre ami de l’auteur, dont la mission dans les années 90 était d’être le premier à commercialiser le vaccin contre le sida. 

La force de l’écriture d’Hervé Guibert se retrouve dans ce qui paraît être une honnêteté brute. Malgré l’éclosion historique et dramatique du sida au sein de la communauté gaie à partir de 1981 jusqu’en 1996², le rapport de l’auteur à cette maladie donne l’impression que celle-ci est vécue comme un macabre jeu grandeur nature. Le manque d’études, de connaissances et surtout d’options de traitement confère aux personnes infectées un pouvoir de vie ou de mort sur leur entourage, ce qui enivre parfois Hervé Guibert et d’autres fois le répugne. Une dynamique à double sens de partage et de rétention de l’information permet de faire ressortir les sentiments les plus profonds de chacun des personnages. 

À l’ami qui ne m’a pas sauvé la vie propose une vision poétique, humaine et sincère de la lente condamnation du VIH.

« C'était une maladie qui donnait le temps de mourir, et qui donnait à la mort le temps de vivre, le temps de découvrir le temps et de découvrir enfin la vie. » (p. 192)

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¹ Michel Foucault, philosophe français mort du sida en 1984, a été une grande influence et source d’inspiration littéraire pour Hervé Guibert qui fut l’un de ses plus proches amis dans les dernières années de sa vie.
² En 1996, les malades commencent à être traité.e.s avec les premières trithérapies qui permettent de faire baisser la charge virale du VIH dans le sang, jusqu’à la rendre indétectable.

Référence 

Auteur : Hervé Guibert
Titre : À l’ami qui ne m’a pas sauvé la vie
Date de parution : 1990
Maison d'édition : Gallimard

Il est possible de se procurer ce livre en librairie au coût de 15,95 $.

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