Transhood (affiche du film) – Photo modifiée par Les 3 sex* – Utilisation équitable

Documentaire • Transhood

14 avril 2022
px
text

Diffusé en 2020 sur la chaîne HBO, le documentaire Transhood de Sharon Liese suit, sur une période de cinq ans, le parcours de quatre enfants trans vivant à Kansas City (Missouri). À travers le portrait intime de leurs familles respectives, Transhood aborde aussi l’accompagnement des parents et des autres membres de la famille, qui sont tour à tour une source de soutien et de tension. Sharon Liese est documentariste et productrice. Elle est connue pour sa série sur les crimes commis par des femmes, Pink Collar Crimes, mais son intérêt pour le documentaire de longue durée et le coming of age¹ n’est pas récent. En 2008, elle a produit High School Confidential, où l’on suit pendant quatre ans une douzaine d’adolescentes d’une école de Kansas City.

Transhood débute en 2014 alors que la plupart des enfants ont entamé leur transition sociale. Jay, 12 ans, garçon d’une mère monoparentale, reçoit sa première injection de bloqueurs d’hormones, tout comme Leena, adolescente de 15 ans. À 7 ans, Avery milite déjà pour la visibilité et les droits des jeunes trans aux États-Unis, comme en témoigne la couverture du magazine National Geographic sur laquelle elle apparaît. Enfin, Phoenix vient d’avoir 4 ans et s’identifie comme « girl-boy », c’est-à-dire, « a boy want to be a girl » (sic) (11:15). Ainsi, Phoenix joue à être une mère, une sœur, une reine, une princesse, mais rectifie son entourage en affirmant son identité masculine.

Si les thèmes principaux de Transhood portent sur la transition, la sécurité dans le milieu scolaire, les relations amoureuses et l’activisme trans, comme l’indique le guide de discussion de HBO, Sharon Liese nous montre également comment l’horizon de la puberté – les seins ou les poils qui poussent ou ne poussent pas – confronte les jeunes à une dysphorie de genre par anticipation. Inquiète des effets de la puberté, Avery s’exclame, lors d’une visite chez la docteure, « I just wanna stay a kid » (26:59). En ce sens, Transhood révèle l’impact positif des métiers du care sensibles à l’affirmation de genre, tels que  la manucure, la coiffure ou la chirurgie.

Grâce à son enquête longitudinale, Sharon Liese articule habilement l’actualité politique au domaine de l’intime, comme en témoigne les scènes entourant l’élection présidentielle en faveur de Trump, le « Bathroom Bill » qui police l’accès aux toilettes dans les écoles pour les personnes trans, et les insultes contre Avery à la sortie du numéro de National Geographic où elle apparaît. Le documentaire montre que ces politiques et comportements transphobes se répercutent sur la vie des jeunes trans, amplifiant leur niveau de stress au point d’entraîner, par exemple, la démobilisation d’Avery.

Le manque d’attention accordé aux enjeux intersectionnels, notamment en ce qui à trait à la question de la racialisation, est l’angle mort de Transhood; les quatre familles américaines sont blanches (ou white passing) et le documentaire n’offre pas explicitement de représentation trans de personnes noires, autochtones ou migrantes. Toutefois, l’intérêt du documentaire réside dans le travail de longue durée de la réalisatrice auprès des jeunes trans, ce qui lui a permis d’observer les changements majeurs propre au temps qui s’écoule, dont le retour de Phoenix vers une identité et une expression de genre masculine, ou encore les transformations physiques de Jay suite à ses injections de testostérone.

***

¹ Coming of age : récit du passage de l’enfance à l’âge adulte

Référence

Réalisation/création : Sharon Liese
Titre : Transhood
Date de parution : 2020

Ce documentaire est disponible sur Crave.

Transgenre, enfant, adolescent, parentalité, puberté, documentaire, États-unis, transphobie, soins d’affirmation de genre