À l’approche des prochaines élections provinciales, les différents partis proposent des engagements divers afin de convaincre l’électorat québécois. Les enjeux politiques actuels sont multiples et ont été abordés lors des différents débats dans les dernières semaines, tels que l’environnement, la santé, l’éducation, etc. Bien que ces sujets soient d’une grande priorité, force est de constater que les engagements politiques pour appuyer les groupes et organismes communautaires au Québec brillent par leur absence. Malgré leur contribution significative à réduire les inégalités et à assurer une plus grande équité dans l’accès aux ressources, les organismes communautaires voient leur avenir très peu discuté dans les débats politiques (MTESS, 2020).
Précarité financière perpétuelle
Pourtant, la situation de précarité dans laquelle évolue plusieurs organismes au Québec a mené environ 4 000 d’entre eux à organiser une grève en février dernier afin de faire pression sur le gouvernement actuel en demandant un investissement annuel récurrent de 460 millions de dollars (Radio-Canada, 2022). Les organismes communautaires LGBTQ+ n’échappent pas à cette précarité, étant principalement financés par projets plutôt qu’à la mission. En effet, selon le rapport de l’IRIS (2022), 53 % des organismes ont identifié le sous-financement comme étant le principal défi auquel ils étaient confrontés. Leur capacité à pouvoir embaucher suffisamment d’employé.e.s à temps plein est donc limitée, entraînant ainsi une surcharge de travail importante.
Ce sous-financement des organismes communautaires québécois LGBTQ+ n’est toutefois pas un enjeu récent, mais plutôt une continuité d’une faible reconnaissance du travail communautaire par les gouvernements qui se sont succédés au cours des dernières décennies. En effet, de 1970 à 2001, les organismes LGBTQ+ n’ont pas obtenu la reconnaissance et le soutien financier qui leur auraient permis de construire des bases organisationnelles solides. Les années de disette se sont étendues de 1990 à 2001, puisque cette période fut marquée par la volonté des États de réduire les dépenses publiques et particulièrement celles liées aux programmes sociaux (a.IRIS, 2022). C’est seulement à partir des années 2010 que la situation s’améliore grâce à la création de nouveaux programmes tant au niveau fédéral que provincial. Deux programmes mis en place, soit le Fonds de développement des capacités communautaires LGBTQ2 du ministère Femmes et Égalité des genres Canada et le Programme Lutte contre l’homophobie et la transphobie du ministère de la justice du Québec, ont contribué plus significativement à l’augmentation du financement disponible. Même si ces programmes offrent aux organismes LGBTQ+ de nouvelles opportunités de financement, ces subventions sont seulement offertes par projet. En priorisant ce type de financement, les organismes dénoncent « l’absence d’impact réel et de pérennité de projets courts » (a.IRIS, 2022) et déplorent également la pression que le développement de nouveaux projets leur crée. Il va sans dire que les organismes sont négligés depuis plusieurs années dans le budget des gouvernements. La demande étant en constante augmentation, 77 % des organismes communautaires affirment avoir besoin de financement supplémentaire pour réaliser leur mission. En moyenne, ce besoin s’élève à 132 835 $ par organisme (RQ-ACA, 2022).
L’importance du financement à la mission
Au sein des organismes LGBTQ+, la source du financement est étroitement liée à l’autonomie des groupes. Le financement à la mission globale permet aux groupes de « disposer de sommes récurrentes pour répondre à leur mission en fonction des intérêts de leurs membres, alors que le financement par projets et les ententes de services sont liés aux critères et préférences établis par les bailleurs de fonds ». (b.IRIS, 2022)
Durant la pandémie, l’IRIS a sondé plus de 700 groupes du mouvement communautaire autonome afin d’en savoir davantage sur leur situation financière pendant la première vague de la COVID-19. Il a été soulevé que « bien que 20 % des groupes [soient] encore dans une situation précaire en raison du sous-financement chronique, les groupes communautaires du Québec s’en sortent généralement mieux qu’ailleurs au Canada grâce à leur modèle de financement basé sur le financement à la mission » (IRIS, 2021). Il est donc indispensable de reconnaître l’importance de ce mode de financement qui permet une plus grande autonomie, stabilité, et distance critique avec le gouvernement, ainsi que des allégements de la charge administrative. En ayant recours au financement par mission globale, il est possible de reconnaître que l’action des organismes communautaires ne se limite pas seulement à la prestation de services et vise également une participation et une transformation sociale. Les bénéfices de ce type de financement ont d’ailleurs été démontrés lors de la première vague de la pandémie alors que les programmes à la mission globale ont permis aux organismes communautaires du Québec d’être plus forts et résilients que dans le reste du Canada (IRIS, 2021). C’est pourquoi Les 3 sex* se joint aux divers organismes communautaires et demande d’augmenter l’apport des subventions à la mission.
Il va sans dire que les groupes communautaires sont des acteurs clés dans nos communautés s’impliquant activement à l’amélioration des conditions de vie et à la défense collective des droits tant au niveau des individus que des familles. Bien que le récent dépôt du plan d’action gouvernemental en matière d’action communautaire (PAGAC) soit une avancée importante pour le milieu communautaire, son contenu n’est pas à la hauteur des besoins et plusieurs questions restent irrésolues.
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