Pisser debout sans lever sa jupe, victime de son incroyable succès l’année dernière, est revenu en supplémentaires au Centre du Théâtre d'Aujourd'hui (25 avril au 4 mai 2024) et au Théâtre Périscope (8 au 18 mai 2024). Cette pièce, incroyable alliage de jeu dramaturgique, de danse, de chant, d’expression corporelle, d’effets visuels en tout genre, se développe dans une ambiance sonore évolutive et calquée sur la trame narrative. Une trame si riche qu’elle est capable de supporter l’éloquence de cette histoire et de lui rendre honneur. Ce qui n’est pas peu dire. Histoire oscillant entre la légèreté d’une soirée entre ami.e.s d’enfance et la lourdeur d’enjeux identitaires et existentiels qui s'immiscent dans leurs échanges. Ariel Charest, Laurence Gagné-Frégeau, Lucie M. Constantineau, Jorie Pedneault, Fabien Piché, Vincent Roy, Zoé Tremblay-Bianco, Sarah Villeneuve-Desjardins… les huit personnes qui sont sur scène incarnent leur alter ego : dans cette autofiction, les comédien.ne.s ne s’encombrent pas de noms de scène et les personnages se mettent à nu – figurativement et littéralement – en dévoilant leur passé, avec de réelles photos et vidéos de leur enfance et adolescence.
Ils, elles et iels nous parlent des défis, des détours, des pensées noires, des questionnements existentiels, des réalisations salvatrices… de toutes ces choses qui rendent le parcours des membres de la communauté LGBTQIA2S+ si tortueux. En adressant les questions vraies, celles qui font mal et puisent dans les parties sombres de nos êtres, ces huit ami.e.s nous forcent à voir ce que nous préférons parfois éviter : nos propres angles morts.
Ce qui est rafraîchissant avec cette pièce, c’est qu’elle déploie une réelle autoréflexion sur la communauté LGBTQIA2S+, sur ses biais, ses jugements, ses lacunes. Pleine d’humanité, cette réflexion pose les bonnes questions : comment pourrions-nous être les meilleur.e.s allié.e.s de nous-mêmes?
Dans ce texte percutant, Olivier Arteau est très cinglant : « Toute ressemblance avec des personnes existantes ou ayant existé est brutalement vraie. C’est l’histoire de ta voisine de palier, ton prof d’éduc, ta mère, peut-être. » Il puise dans ses propres démons pour livrer une pièce authentique et décomplexée. Les voix des personnes qui sont sur scène, tantôt en paroles, tantôt en chant, portent très bien son message : on veut plus de douceur, même au sein de nos propres rangs. On veut arrêter de se justifier d’exister, même à nos propres yeux. Comme le chante si bien Narcisse (Jori Pedneault), cette voix off trop souvent prise pour acquis, mais qui est ici soulignée de façon magistrale et sensible : « j’ai peur de mourir, peur de choisir. Peur des gens, peur de moi-même ».
Référence
Texte et mise en scène : Olivier Arteau, avec l’assistance de Lucie M. Constantineau
Titre : Pisser debout sans lever sa jupe
Dates : En supplémentaires, 25 avril au 4 mai 2024
Salle : Centre du Théâtre d’Aujourd’hui