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Violences sexuelles en milieu universitaire au Québec : Rapport de recherche de l’enquête ESSIMU

1 mars 2017
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Date de publication
Décembre 2016

Résumé original
Cette recherche, intitulée « Enquête Sexualité, Sécurité et Interactions en milieu universitaire (ESSIMU) : ce qu’en disent étudiant(es), enseignant(es) et employé(es) », a permis d’établir un portrait des violences sexuelles se déroulant en contexte universitaire au Québec. Cette enquête provinciale d’envergure regroupe 12 chercheures provenant des 6 universités suivantes : Université du Québec à Montréal, Université de Montréal, Université Laval, Université de Sherbrooke, Université du Québec en Outaouais et Université du Québec à Chicoutimi. L’équipe interdisciplinaire et interuniversitaire compte également le Regroupement québécois des centres d’aide et de lutte contre les agressions à caractère sexuel et le Service aux collectivités de l’UQAM.

Afin de documenter les situations de violence sexuelle vécues en milieu universitaire (VSMU), l’équipe ESSIMU a réalisé en 2016 une vaste étude auprès de 9 284 répondants (es) dans 6 universités québécoises francophones. Le questionnaire, administré en ligne, a permis de rendre compte d’un large éventail de manifestations de violence sexuelle vécues par l’ensemble de la communauté universitaire (étudiant ou travaillant à l’université). La mesure de victimisation distinguait le harcèlement sexuel (comportements verbaux et non verbaux qui traduisent des attitudes insultantes, hostiles et dégradantes), les comportements sexuels non désirés (comportements verbaux et non verbaux à caractère sexuel, offensants, non désirés ou non réciproques, incluant la tentative de viol et l’agression sexuelle) et la coercition sexuelle (chantage en retour de récompenses).

L’enquête ESSIMU met en lumière plusieurs constats démontrant que les VSMU affectent directement un grand nombre de personnes travaillant ou étudiant dans les six universités à l’étude, dont les suivants :

1. Plus du tiers (36,9 %) des répondants(es) ont rapporté au moins une forme de victimisation sexuelle commise par une autre personne affiliée à l’université depuis leur entrée à l’université. Les données obtenues quant à la fréquence au cours des 12 derniers mois sont tout aussi alarmantes : près du quart (24,7 %) des répondant.es rapportent avoir vécu au moins une forme de VSMU durant la dernière année ;

2. Chez les personnes ayant rapporté des situations de VSMU, 41,8 % ont vécu 2 ou même 3 formes de VSMU depuis leur arrivée à l’université ;
3. Certains groupes sociaux semblent davantage exposés aux VSMU. Ainsi, la victimisation est plus fréquente chez les femmes, les individus issus de minorités sexuelles et de minorités de genre1, ainsi que chez les personnes déclarant avoir un handicap ou un problème de santé ayant un impact dans leur vie quotidienne et les étudiant.es de l’international ;

4. Beaucoup de victimes gardent le silence : plus du tiers des personnes n’ont jamais dévoilé la situation de VSMU à quiconque. Par conséquent, elles reçoivent rarement des services d’aide et les comportements problématiques ne peuvent faire l’objet de mesures disciplinaires. Par ailleurs, seulement 9,6 % des participant.es ont dénoncé ou signalé la situation aux instances de leur université. Les statistiques institutionnelles actuelles ne peuvent donc être considérées comme des indicateurs valides de l’ampleur du phénomène ;

5. Près de 1 victime sur 2 (47,3 %) rapporte des conséquences préjudiciables affectant une ou plusieurs sphères de sa vie, telles que la réussite scolaire ou professionnelle, la vie personnelle ou sociale, la santé physique et la santé mentale. Pour près de 1 victime sur 10 (9,2 %), les conséquences s’apparentent à l’état de stress post-traumatique (ex. : faire des efforts pour éviter des situations rappelant l’événement ou être constamment sur ses gardes) ;

6. Une personne sur quatre a rapporté avoir été témoin ou avoir reçu une confidence de la part d’une autre personne de la communauté universitaire victime de VSMU. Ces personnes ont un rôle actif à jouer dans le soutien aux victimes, mais aussi dans la prévention et le signalement ;

7. Plusieurs préjugés vis-à-vis des violences sexuelles sont incontestablement présents dans la communauté universitaire. Si la grande majorité des répondant.es est en désaccord avec l’ensemble de ces préjugés, un pourcentage non négligeable (entre 7,1 % et 38,7 %) des répondant.es se déclare neutre ou en accord avec des croyances préjudiciables aux victimes, que l’on peut associer à l’idée de culture du viol, c’est-à-dire qui culpabilisent les victimes, minimisent les gestes de violence sexuelle et déresponsabilisent les individus qui les commettent. Les hommes ont endossé significativement plus ces croyances que les femmes et les individus issus des minorités de genre ;

8. Une très forte majorité de répondant.es estime nécessaire que les universités se montrent davantage proactives en matière de prévention et se dotent de politiques qui permettront de mieux informer sa communauté des démarches à entreprendre et des canaux qui existent pour appuyer les personnes victimes et/ou témoins de VSMU.

L’enquête ESSIMU constitue une première initiative au Québec pour documenter les violences sexuelles non pas exclusivement auprès de la population étudiante, mais auprès de toute la communauté universitaire, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur des murs de l’université. L’équipe ESSIMU tient à remercier les milliers de personnes ayant répondu au questionnaire en ligne, de même que tous les groupes et instances ayant relayé l’invitation à ces fins.

Référence 
Bergeron, M., Hébert, M., Ricci, S., Goyer, M-F., Duhamel, N., Kurtzman, L., Auclair, I., Clennett-Sirois, L., Daigneault, I., Damant, D., Demers, S., Dion, J., Lavoie, F., Paquette, G., et Parent, S. (2016).Violences sexuelles en milieu universitaire au Québec : Rapport de recherche de l’enquête ESSIMU. Montréal : Université du Québec à Montréal.

Pour accéder à la production scientifique entière
http://essimu.quebec/wp/wp-content/uploads/2015/12/Rapport-ESSIMU_COMPLET.pdf 

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