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Témoignage • Mamie, docteure relationnelle

14 février 2020
Edwin L'Écoeuré
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Les témoignages sont des textes produits par des personnes ne provenant pas obligatoirement des disciplines sexologiques ou connexes. Ces textes présentent des émotions, des perceptions et sont donc hautement subjectifs. Les opinions exprimées dans les témoignages n'engagent que leurs auteur.e.s et ne représentent en aucun cas les positions de la revue.

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« Ben là, toujours pas de blonde? »

Here we go, c’est parti — c’est ce temps-là de l’année.

 

Disons que j’commence à perdre le compte des moments où il semble primordial pour les membres de mon entourage de connaître mon statut relationnel.

Mais bon, on est à table, j’suis poli, et j'ai beau être (encore) en formule 1+0, je vais répondre. Je sens que les additions semblent être un concept qui leur échappe — toute réponse autre que deux semble invalide ou insuffisante, peu importe comment je me défends.

 

- Non. Toujours pas de blonde.

 

C’est sec et c’est simple — mais crisse que c’est pas efficace. J’imagine déjà mamie sortir son calendrier, préparer son stylo, tout bonnement, et prendre note du prochain événement annuel où elle pourra ressortir son stéthoscope relationnel et tâter mon pouls, voir si je suis normal. Tsé, normal comme tout le monde, en mode 1+1 là.

« Ben là, toujours pas de blonde ? » Tsé, cette question-là, c’est comme le vieux CD scratché qui est coincé dans le lecteur de ton vieux char : les autres tracks du disque grichent et sautent, mais eille, celle-là — celle-là elle joue encore bien. Plutôt que de fouiner dans son répertoire interne et de fredonner une autre toune, c’est pas mal plus simple de peser sur play, en boucle, à chaque moment de silence, right?

Le problème, mamie, c’est que t’es pas la seule dans le char. J’veux dire, ça parait quand la toune commence que j’trippe pas tant — j’chante pas, j’fredonne pas — j’tappe même pas du pied. Mais sure, joue-la encore voir comment je réagis cette fois-ci. Après tout, les autres dans le char ne le voient pas le problème, eux: ils sont comme toi. Ils et elles ont une douce moitié — ils ont réussi — elles sont un exemple à suivre. Les autres passagers sont loin d'être comme moi, un échec dans sa mi-vingtaine, incapable de trouver chaussure à son pied. Tsé son pied nu qui se promène déjà si confortablement qu’il n’a pas vu la nécessité de faire un détour chez Boutique Courir?

Selon eux, le choix dans la boutique est infini. Selon elles, il doit exister une paire qui rendra mes déplacements plus agréables.

 

The thing is, j’en ai essayé — j'en ai essayé de toutes les sortes.

 

La paire « robuste et indestructible » qui devrait « tougher toute la vie », la paire un peu plus casual pour prendre des marches, la paire un peu trouée que t’essaies de faire revivre malgré qu’elle soit franchement plus supportable, pis même la paire que tu t’es procurée en vente finale, swipant les rabais en ligne, cette paire que t’as regrettée dès l’instant où vous avez fait un pas ensemble.

 

- Non en fait, j’avoue que j’suis bien, seul. J’aime ça.

 

Un peu de transparence, ça peut pas faire de mal, right? Pourquoi aurais-je besoin d'exposer tous les tests relationnels que j'ai faits dans le passé simplement pour leur confirmer que je suis célibataire? Crisse, on a pas toute la soirée pour jaser de mes innombrables essais-erreurs quand même.

 

« Pour savoir si t'aimes ça ou pas, faut que t'essayes! »

Celle-là, étrangement, j’la contredis pas. C’est vrai. Mais je les ai faits mes essais. J’ai essayé d’être avec autrui. J’ai testé les versions longue durée et courte durée, j’ai testé les versions occasionnelles et fréquentes, j’ai testé les versions sérieuses et moins sérieuses. Trust me, j’ai testé.

J’ai testé 1+0 et j’ai testé 1+1. J’admets que la deuxième de ces équations n’était peut-être pas mon genre d'addition pis que j’ai même pas voulu testé 1+ n, où n>1. La première des deux formules, je la catche, je la vis bien pis j’ai pas l’intention de la changer pour le moment.

« Ben tsé, tu peux pas savoir que t’aimes pas ça si t’as pas encore essayé! »

 

- Effectivement, mamie, effectivement.

J’ai baissé la tête vers mon assiette et j’ai rapidement pris une grande bouchée — ma technique préférée pour ne pas jeter de l’huile sur le feu — en lui répliquant : Mamie, t’as essayé quoi, toi, à part tes 50 années avec papi? Sais-tu si t’es heureuse, seule?

 

Moi je le suis.

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D'autres témoignages sont disponibles dans le dossier « Célibat. Vers une redéfinition positive ». N'hésitez pas à consulter le dossier en entier pour en connaitre plus sur cette réalité.

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